Reynders et ses copains: une affaire qui marche!

Alors que depuis des années, les enquêtes de Kairos autour de la constellation Reynders laissaient suspecter que nous avions affaire à un milieu interlope fait de corruptions, blanchiment, comptes offshore, touchant la France, La Libye, le Kazakhstan, le Congo…, l’actualité semble nous donner raison, même si le « scoop » passé, on n’entend plus beaucoup parler dans les médias du pouvoir d’un de leur ‑ancien — petit préféré. L’affliction de Reynders lors de son audition devant les parlementaires européens pour son poste de commissaire à la justice, en 2019, où il disait : « Je ne souhaite à personne de vivre ce que mes proches, ma famille, mes enfants, mon épouse et moi-même avons vécu ces 15 derniers jours. L’État de droit, c’est aussi la présomption d’innocence », n’était que du fake, alors que l’homme avait déjà réalisé des dépôts suspects sur ses comptes ING pour un montant total de près de 800.000€. La roue tourne, peut-être, pour celui qui n’a toujours été qu’un protecteur zélé des riches et des puissants, sans doute lâché par son clan. Ce qui nous valut attaques et pressions se révèlent donc enfin, avec notre seul « tort » : celui d’avoir eu raison trop tôt et d’avoir eu le courage de le dire.

Il est une vérité qui relève non de la présomption, mais de la certitude : depuis les débuts de sa carrière politique, Didier Reynders est un champion des conflits d’intérêts et des liaisons dangereuses entre mondes politique et économique

Didier Reynders, l’homme qui parle à la poche des riches, 9 décembre 2024

Nous apprenions en effet récemment que la Banque Nationale, superviseure des opérations anti-blanchiment, était en charge d’une enquête sur la banque ING. L’affaire est sérieuse : dès 2018, ING banque découvre des dépôts importants sur le compte de Didier Reynders — total allant jusqu’à 800.000 euros -, et lui en fait part. Malgré cela, ING ne voit pas à l’époque d’intérêt à prévenir la Cellule de Traitement des Informations Financières (CETIF), et attendra 2023, alors que l’enquête judiciaire avait déjà commencé. ING, dans un geste de grande bonté, a sans doute fait entendre à Monsieur Reynders qu’il ne devait plus déposer de telles sommes d’argent en cash sur son compte et donc changer de méthodes de blanchiment. De là peut-être le passage aux jeux de hasard et les sommes conséquentes utilisées…

Quelles protections?

Le dossier pose toutefois plusieurs questions. D’abord, on s’étonne de l’amateurisme de L’homme qui murmurait à l’oreille des riches, dépensant jusqu’à 3000€ par semaine en billets de Loterie dans une station-service uccloise… on avait connu des opérations plus discrètes dans les affaires précédentes(1). Ensuite, le dossier soulève évidemment la question essentielle de la provenance de cet argent, même si cela ne semble pas constituer un sujet d’étonnement pour les médias de masse. Enfin, concernant le rôle de la Banque Nationale, on est en droit de se poser des questions sur sa neutralité dans ce dossier. Didier Reynders a‑t-il été couvert, ceux qui savaient l’ont-ils lâché à un moment donné ? Pourquoi alors ? Parce que l’enquête judiciaire en cours ne leur laissait plus le choix ? Ou que le clan a décidé de lâcher son ancien mentor, laissant toute la place aux nouveaux requins du type Boucher ?

On peut en tous cas se poser la question des protections et collusions entre la banque et son client « PEP » (personne exposée politiquement) qui aurait dû faire l’objet d’une attention particulière. Le dirigeant de ING, Pierre Wunsch, a été chef de cabinet de Didier Reynders de 2008 à 2011… Peut-on dès lors envisager qu’en 2018, cette proximité entre le patron et son client ait participé à couvrir Monsieur Reynders ? L’enquête nous le dira, peut-être…

Le CA d’ING en cause? 

Étant donné les responsabilités qu’il avait dans notre gouvernement, cette décision aurait dû relever du conseil d’administration de la banque. Quelle était la liste des administrateurs d’ING à cette époque ? Surprenant… on y retrouve le nom d’une vieille connaissance de Monsieur Reynders :  l’homme d’affaire Luc Bertrand.

Qui est Luc Bertrand ? Il est d’abord Directeur de DEME, impliquée dans plusieurs affaires de corruption importantes. Cette société a notamment été condamnée à une très lourde amende par une juridiction suisse suite à une affaire de corruption au Nigéria. En 2014 et 2015, des filiales d’AvH ont discrètement financé l’asbl « Les plus beaux villages de Wallonie », dont le trésorier n’est autre que Jean Claude Fontinoy, bras droit de Didier Reynders.

En 2012, Didier embauche Alexia, la fille de son ami Luc : elle intègre l’équipage du ministre pour, en 2015, devenir sa cheffe de cabinet. Prestant chez un maître du conflit d’intérêts, elle ne décèle aucune incongruité à intégrer en 2013 le conseil d’administration d’AvH, le puissant holding de sa famille

https://www.ptb.be/actualites/didier-reynders-lhomme-qui-parle-la-poche-des-riches

En 2016, une enquête a commencé concernant 8 millions de pots de vin accordés à des fonctionnaires russes concernant le dragage du passage du Nord. C’est le FBI qui a prévenu la police belge suite à des écoutes. Mais de façon très surprenante, le tribunal décide de relaxer la société. Est-ce un renvoi d’ascenseur obtenu par Didier Reynders, commissaire européen à la Justice et dont la femme est une ancienne haute magistrate (comme sa sœur…)? Un remerciement pour la décision prise en 2018 par les dirigeants d’ING Belgique de ne pas dénoncer Reynders à la Cetif ?

Enfin, une dernière affaire semble avoir causé quelques désagréments au baron Bertrand. En avril 2024 une enquête est initiée, relative à la construction d’un hôtel de luxe au Tchad par la filiale CFE d’AvH. Les policiers belges et français ont procédé à une série de perquisitions dont une au domicile de Luc Bertrand.

En résumé, on constate que Luc Bertrand est au cœur du dispositif de corruption et de blanchiment que les magistrats belges soupçonnent : Administrateur d’ING qui ne dénonce pas Didier Reynders, alors qu’il ne pouvait pas ne pas connaître ses dépôts de sommes conséquentes ; nommé à la tête de la commission nobiliaire par Didier Reynders ; Père d’Alexia, devenue chef’cab de Didier Reynders ; donateur de l’asbl les plus beaux villages de Wallonie ; derrière la société Rent a port avec JC Fontinoy…

On se croirait dans une mauvaise série de Netflix mais, hélas, ce n’est que la réalité !

Quelques références:
- Didier Reynders, l’Arabie Saoudite et le dragueur un peu lourd, Le Vif, 11 mai 2017.
- DEME condamné en Suisse pour corruption, L’Echo 2 juin 2017.
- La justice belge poursuit le groupe belge de dragage Deme pour corruption en Russie, 1 avril 2021,
RTBF.

Notes et références

1. Voir les enquêtes de Kairos : https://www.kairospresse.be/bienvenue-en-ploutocratie-kazakhgate-afrique-reseaux-le-mr-a-tous-les-etages/, https://www.kairospresse.be/kairos-et-didier-reynders/, https://www.kairospresse.be/laffaire-bulgare-et-didier-reynders/… de nombreuses vidéos ne sont momentanément plus disponibles suite à la fermeture de notre chaîne YouTube.

 

 

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